En France, comme dans toute l'Europe, nous constatons la présence et le renforcement dans nos universités du « Processus de Bologne », un cadre européen de réformes structurelles de l'enseignement supérieur visant à construire "l'enseignement supérieur le plus compétitif au monde". Mais ce processus n'est pas sans conséquences, et ces conséquences, ce sont bien sûr les étudiants et les personnels universitaires qui les subissent: augmentation des montants des frais d'inscription, suppressions de filières, de diplômes ainsi que de postes d'enseignants, baisse de la qualité de l'enseignement, précarité (notamment pour le logement), etc... Il n'est pas nécessaire de faire toute une dissertation pour comprendre que l'objectif réel est la privatisation de l'enseignement supérieur ainsi que le renforcement de la mainmise des entreprises sur cet enseignement, dans une logique de profit typique de l'UE du capital.


De ce fait, il existe dans la très grande majorité des universités des organisations étudiantes luttant contre cette dégradation de la qualité de leurs études. Ces organisations, allant des syndicats étudiants cogestionnaires (Union Nationale des Étudiants de France - UNEF,...), aux syndicats de lutte (Fédération Syndicale Étudiante - FSE,...), et aux diverses organisations politiques progressistes (Union des Étudiants Communistes - UEC,...), sont en première ligne des luttes contre cette casse de l'enseignement supérieur, avec leur différents moyens de luttes: négociations pour certaines (très généralement infructueuses), mobilisations des étudiants, blocages, grèves, manifestations pour d'autres.


Le cas des frais d'inscription dans l'enseignement supérieur français est assez particulier. Il existe une échelle des montants fixées par le ministère, concernant les étudiants français et étrangers (qui payent donc le même montant): 181€ pour une année de licence, 250€ pour une année de master, 380€ pour une année de doctorat. Il existe aussi un système de bourses permettant une réduction de ces frais, voire l'exonération de ces frais, pour les élèves bénéficiaires des ces bourses du gouvernement français ainsi que pour les Pupilles de la Nation (enfants victimes de la guerre). Cependant, chaque étudiant (à l'exception des deux catégories mentionnées ci-dessus) doit cotiser à la sécurité sociale étudiante auprès de mutuelles étudiantes privées (!), pour un montant de 207€ par an.


Le second problème, de taille, est l'augmentation des frais d'inscriptions pour certains diplômes de manière illégale par certaines universités, comme on a pu le voir pour les Master 2 à Grenoble II (1200€) et Aix-Marseille III (3500€) ! Ces augmentations de tarifs ne bénéficient de l'autorisation d'aucun texte de loi, et sont par conséquent totalement illégales. C'est un des effets de la mainmise donnée aux dirigeants d'entreprises sur les universités, notamment par la loi LRU de 2007.


Cette loi LRU (loi relative aux libertés et responsabilités des universités), promulguée en 2007, fût le dernier déclencheur de grandes mobilisations étudiantes en date. En effet, cette loi, dans la totale continuité du processus de Bologne, réalise un grand pas vers l'objectif de la privatisation de l'enseignement supérieur français: autonomie économique des universités passant de 25% des budgets à 100% des budgets (!), recul de la démocratie dans la direction des universités (Conseils d'Administration laissés aux mains des extérieurs à la communauté universitaire comme des dirigeants d'entreprises, recul des places pour les délégués syndicaux, ainsi que des représentants du personnel enseignant et des étudiants laissés pour la caution démocratique,...), réduction des effectifs dans le personnel universitaire,... L'objectif ce cette loi, c'est de rendre l'université plus attractive non seulement pour les entreprises, mais aussi pour les investissements étrangers, via leclassement de Shanghai. Cette loi fût un nouveau pas vers la privatisation de l'enseignement supérieur.


Les étudiants, ainsi que des enseignants, se mobilisèrent fortement face à cette loi, par des grèves, des blocages d'universités. Des collectifs furent créés comme le CECAU (Collectif étudiant contre l'autonomie des universités), auquel prirent part des syndicats étudiants (FSE, Sud,...) et des organisations politiques de gauche (UEC,...). Mais cette mobilisation finit par s'effondrer, à cause de la forte répression policière et médiatique, mais aussi à cause du « syndicat de collaboration », l'UNEF, qui après des fraudes en Assemblées Générales (où les étudiants décident plus ou moins collectivement des orientations de leurs luttes), appela à une « levée des blocages », pour lancer des négociations avec le gouvernement qui furent évidemment un échec.


Et aujourd'hui, le nouveau danger pesant sur l'enseignement supérieur s'appelle IDEX, un processus visant à créer une université à deux vitesses, et à y renforcer l'élitisme... Qui s'accompagnera également d'augmentations de frais d'inscription, ainsi que de très nombreuses suppressions de poste et de filières.


M.A.


A lire à propos de l'IDEX: le communiqué de l'UEC de Paris 7 – Diderot sur ce projet: http://uecparis7.wordpress.com/2012/11/26/idex-lenseignement-superieur-doit-rester-un-service-public/